« La notion de design ne se limite pas à la forme et à la fonction », explique Gabriele Chiave, directeur créatif. Face à l'importance croissante de la notion d'économie circulaire, il donne son avis sur l’importance du rôle des designers dans la promotion d’un avenir durable et présente son installation pour Audi à la Semaine du design de Milan.
La suspension Flos Skynest de Gabriel Chiave et du studio Marcel Wanders est assemblée à partir de matériaux classiques d’une nouvelle manière. Un processus qui fait de cette lampe une excellente représentation de l'innovation en matière de design : repenser à partir de zéro le processus de création d'un produit.
La suspension Flos Skynest de Gabriel Chiave et du studio Marcel Wanders est assemblée à partir de matériaux classiques d’une nouvelle manière. Un processus qui fait de cette lampe une excellente représentation de l'innovation en matière de design : repenser à partir de zéro le processus de création d'un produit.
Monsieur Chiave, jusqu'à présent, l'univers du design était fondé sur le principe du fonctionnalisme : « form follows function » (la forme suit la fonction). Comment ce principe évolue-t-il maintenant que le développement durable est de plus en plus central ?
À mon sens, l'idée que le design suit la forme est exagérée et occulte des aspects plus importants. Pour moi, le design est avant tout une question d'émotions, de souvenirs, de rêves, de traditions, de culture et d'artisanat : il doit parler au cœur avant de toucher la raison. La mission des designers, c'est de résoudre des problèmes. En améliorant le quotidien des gens, nous améliorerons aussi le bien-être de notre planète. C'est pourquoi la durabilité, et en particulier la circularité, devient extrêmement importante pour les designers. Chacun de nous est responsable de son propre mode de vie, de sa consommation et de son état d'esprit vis-à-vis de l'environnement. Mais nous, les designers, avons un rôle encore plus important à jouer : nous sommes ceux qui inventent et fabriquent les nouveaux produits. . Et créer de nouveaux objets n'est peut-être pas toujours le bon choix : de nos jours, la “nouveauté” n’est pas nécessairement la réponse à tout. D'une certaine manière, notre époque assiste à une sorte de renaissance du design.
Comment la circularité impacte-t-elle la phase de conception ?
Tôt ou tard, les gens apprendront à connaître et à apprécier tout naturellement les différents produits recyclables et écoresponsables. Nous essayons donc de réutiliser, de recycler et de redéfinir les choses. Il s’agit finalement de repenser le processus de création d’un produit depuis le début. Nous avons par exemple conçu cette lampe Flos Skynest au studio Marcel Wander. Elle s'inscrit dans un design intemporel, qui allie le traditionnel art du tressage artisanal à des techniques d'éclairage innovantes. Chaque élément lumineux est relié à la bague de suspension et à l'anneau périphérique via un système de connexion très simple, qui permet de le démonter facilement pour le réparer ou le recycler. À mon avis, cette suspension est l'essence même de l'élégance artisanale : durable, éthique, avec des technologies innovantes.
Gabriele Chiave vit avec sa femme et sa fille à New York, où il est directeur créatif international pour une célèbre entreprise de cosmétiques.
En tant que directeur de la création du studio Marcel Wanders, Gabriele Chiave a conçu la lampe Flos Skynest comme représentation de l’innovation en matière de design : repenser le processus de création d'un produit à partir de zéro.
Gabriele Chiave vit avec sa femme et sa fille à New York, où il est directeur créatif international pour une célèbre entreprise de cosmétiques.
En tant que directeur de la création du studio Marcel Wanders, Gabriele Chiave a conçu la lampe Flos Skynest comme représentation de l’innovation en matière de design : repenser le processus de création d'un produit à partir de zéro.
Gabriele Chiave
Comment les designers peuvent-ils jouer un rôle essentiel dans la promotion d’un avenir durable ?
Nous avons un rôle crucial à jouer dans ce processus ! En tant que designer, ma ligne directrice est toujours « moins et plus » : moins de quantité et plus de qualité. Concrètement, je fais mon possible pour créer des objets qui restent plus longtemps dans nos vies. Mais je suis convaincu que le rôle d'un designer va bien au-delà de ce qu'on croit en général ! Nous avons la responsabilité d'informer les consommateurs et de les inciter à adopter un mode de vie plus écoresponsable. Nous ne pouvons pas nous contenter de parler de nos créations en plastique ou d'autres matières recyclées, il faut aller bien plus loin. Nous voulons changer le mode de vie des gens, transformer leur quotidien pour faire évoluer leur état d'esprit. Donc nous parlons d'abord à leurs émotions pour les inciter à investir dans des objets, des produits et des expériences plus durables. Dans notre métier, nous avons la responsabilité collective de sensibiliser les gens pour qu'ils adoptent un comportement plus écoresponsable. Nous devons leur montrer comment consommer moins ou mieux.
Gabriele Chiave
Quel est le lien entre l'art, le design et l'économie circulaire ?
L'économie circulaire garantit la durabilité du design, et c'est génial ! Parce que quand vous aimez vraiment une pièce, vous avez envie de la garder aussi longtemps que possible, n'est-ce pas ? Ces objets peuvent même se transmettre de génération en génération. Ces créations ont une valeur émotionnelle, qui en fait des intemporels du design : c'est ce que j'appelle la durabilité émotionnelle. L'objectif final est donc de fermer la boucle : le design n'est pas l'aboutissement d'un chemin en ligne droite, mais un processus de création, de production, de consommation et de présentation. Le design est un cercle, où chaque élément interagit avec les autres, tout est connecté. C'est l'idée centrale de l'installation « The Domino Act », que j'ai conçue pour Audi à l'occasion de la semaine du design de Milan cette année.
Au cours de la semaine du design 2023 de Milan, Audi présente différentes stratégies d'économie circulaire dans son installation « The Domino Act ».
Au cours de la semaine du design 2023 de Milan, Audi présente différentes stratégies d'économie circulaire dans son installation « The Domino Act ».
En parlant de votre installation pour Audi : pouvez-vous nous dévoiler sa signification cachée ?
Cette structure est une réinterprétation de l'effet domino. L'effet domino est une théorie formulée par les Nations unies, selon laquelle toutes les ressources et tous les problèmes environnementaux sont étroitement liés, par exemple la pénurie alimentaire, la pollution des terres, de l'air et de l'eau, ainsi que la déforestation. Il ne s'agit donc pas de problèmes distincts. Nous avons donc choisi de baptiser notre structure « Domino Act », un terme à la connotation plus positive. Ce terme sous-entend qu'un seul petit pas vers le respect de l'environnement ne changera pas notre quotidien, mais si tout le monde fait le même petit pas dans la même direction, alors nous y arriverons. C'est le début du changement. Cette structure est donc un effet domino positif, qui n'est pas une conséquence, mais un choix délibéré, une action commune. Ensemble, nous allons changer notre planète pour en faire un monde meilleur.